Fiche technique:
Auteure : Heather W. Petty
Genre : Blasphé-lémentaire mon cher Watson !
Éditeur : Le Livre de Poche Jeunesse
Année de publication : 2017
ISBN : 9782017027836
4ème de couverture :
Londres, de nos jours.
Deux lycéens à l’intelligence exceptionnelle, M. Sherlock « Lock » Holmes et Miss James « Mori » Moriarty font connaissance. C’est un meurtre qui va les rapprocher. Mais la vérité pourrait bien les séparer à tout jamais.
Mon avis :
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Bonjour, jeune étranger, bienvenue dans la Bibliothèque Oubliée, lieu de mystères et de connaissances interdits au commun des mortels… Quel est l’objet de ta quête ?
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Euh… Bonjour… Je cherche un livre !
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Dommage, on en a pas ici. Essaie à la Charcuterie Oubliée un peu plus loin dans la rue.
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Pardon ?
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Désolé, c’était de l’humour de bibliothécaire.
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C’était pas drôle…
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C’est pour ça qu’on dit « humour de bibliothécaire ». Que puis-je faire pour vous ?
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Alors, voilà. J’adore Sherlock Holmes et j’ai lu tous les romans qui en parlent ?
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Tous ?
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Tous !
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Le canon des nouvelles de Conan Doyle ?
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Lu !
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Les suites officielles et non officielles ?
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Lues !
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Les adaptations en BD, en comics, en mangas ?
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Lues !
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Les grands ?
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Lus !
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Les petits ?
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Lus !
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Ha ha !
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Hé hé ! Vous m’avez bien eu.
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N’est ce pas ? Avez-vous essayé les séries dérivées ?
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Oui. J’ai lu les différents tomes d’Enola Holmes, mais on m’a parlé d’une autre série… Lock &…
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Non !
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Quoi ?
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Ne finissez pas cette phrase.
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Ben si, on m’a parlé de Lock & Mo…
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NON !
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Quoi encore ?
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On ne prononce pas ce nom ici… Ou alors, seulement à voix basse.
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Ah bon ? Lock & Mori ?
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C’est cela… Maintenant, évitez de le répéter….
Non mais c’est vrai quoi ! Sherlock Holmes doit être, si je m’abuse, LE personnage le plus adapté de l’histoire de littérature. Films, séries, dessins animés, j’en passe et des meilleurs ! On a eu Sherlock Holmes dans le futur, Sherlock Holmes dans le passé, Sherlock Holmes en nain de jardin… Avions-nous réellement besoin d’avoir Sherlock Holmes en « romance pour adolescentes en pleine crise de l’âge ingrat » ? Eh bien, il semblerait que oui.
Heureusement, Sherlock n’est pas le héros de ce roman. Cet honneur contestable revient à Miss James (oui, ça peut être un prénom féminin si l’on considère que l’auteure n’a pas voulu se donner la peine de changer son prénom parce que ça devrait être trop difficile de trouver un équivalent comme Jane, Janet, Jean, Jamie, Jamesina, Jaimie, Jaymie…). Adolescente solitaire depuis la mort de sa mère (enfin solitaire… sauf quand l’intrigue lui demande d’être sociable et d’avoir des amis) et prisonnière d’un père policier, alcoolique, dépressif et violent qui la martyrise elle ainsi que ses trois frères.
Pas de raisons de se réjouir donc pour la jeune James (que nous appelerons Mori – comme tous les personnages du roman – pour oublier que Mrs Petty n’a pas eu l’idée de chercher un autre prénom) si ce n’est son nouveau petit ami : Lock. Véritable petit génie aux tendances autistes, il lui propose de se changer les idées en enquêtant sur les crimes d’un tueur en série qui sème ses victimes dans Regent’s Park… Pourquoi ? Il peut pas lui proposer de venir regarder une série sur Netflix comme tout le monde ? Allez au cinéma c’est pas assez bien pour Monsieur Holmes (que nous appelerons Lock – comme tous les personnages du roman – parce que l’auteure s’est dit que ça sonnait bien?).
Hélas ce que Lock ignore, c’est que ces crimes touchent Mori bien plus que lui-même.
Évidemment, je vais me permettre de redire que ce roman n’est sans doute pas destiné à la catégorie de lecteur à laquelle j’appartiens. Je pense que n’importe quelle adolescente un tant soit peu mal dans sa peau, en guerre avec son père et amoureuse d’un type qui ne comprend rien à rien va se reconnaître dans le personnage de Mori. Malheureusement pour moi, mes relations avec moi-même, ma famille et le sexe opposé sont au beau fixe… et l’intrigue ne m’a jamais touché.
Par contre, s’il y a bien quelque chose que je suis, c’est un Sherlockien de la première heure. Je veux bien admettre que ce roman puisse plaire, que l’idée d’un Lock adolescent résolvant des crimes avec sa petite amie peut être intéressante, mais… Pourquoi faire de Moriarty une jeune fille alors que le personnage d’Irène Adler convient bien mieux ? Surtout que… Moriarty devient donc la fille d’un policier et tout laisse sous-entendre que ce dernier n’est même pas son père… donc elle ne s’appelle pas Moriarty… et si c’est pour me balancer à la fin du troisième tome (qui n’arrivera jamais en France, je le crains et l’espère en même temps) que son vrai nom est Adler… quel est l’intérêt ? On garde Irène pour plus tard ? Comme les autres second rôles ? Parlons-en… Watson passe le bout de son nez dans deux scènes où il est inutile. Mycroft se révèle être un stalker chelou et tous ces personnages emblématiques dans les autres versions ne sont plus que des silhouettes à peine dessinées par une auteure qui préfère nous assommer de longues descriptions de roulage de pelles adolescents.
Tout est centré sur Mori et sur ses choix plus que discutables et leurs conséquences. L’intrigue policière est réglée en deux coups de cuillère à thé… Oui cuillère à thé, parce que servir une tasse de thé à quelqu’un est le seul moyen de montrer un tant soit peu d’empathie dans l’univers de ce roman. Les personnages ne se parlent pas, ne se confient pas, ILS SE SERVENT DU THE ! Vraiment, lisez-le et comptez combien de litres les héros s’enfilent plutôt que de discuter de leurs problèmes respectifs.
En résumé, un roman qui ne raconte pas grand chose mais qui arrive à le faire mal, ou pour de mauvaises raisons… La date de sortie originale laisse à penser que Mrs Petty a pondu cette romance pendant l’explosion de la série Sherlock de la BBC et à une époque où les fanfics se plaisaient à mettre le détective dans les bras de sa nemesis. De là à dire que c’est de là qu’est venue l’idée du roman, il n’y a qu’une déduction à faire…
Ombre.